vendredi 5 octobre 2007

Les LBO dans la grande consommation: vision de court terme ou véritable opportunité?


Le groupement HEC grande consommation a organisé récemment une conférénce en collaboration avec Patrick Mispolet, PDG d'Orangina-Schweppes, et Michel Larroche, Président de Mont Blanc - Materne, pour parler des effets des LBO sur la gestion des entreprises de grande consommation.

En effet, Orangina-Schweppes et Mont Blanc - Materne ont fait l'objet en 2006 (Mont Blanc déjà en 2003) de rachats de la part de fonds d'investissement.

Pour Orangina-Schweppes, il s'agit d'une copropriété à 50-50% par Lion Capital et le groupe Blackstone.

Pour le groupe Mont Blanc-Materne le principal investisseur est le groupe de private equity Activa Capital avec la participation d'ING Parcom.

Qu'est-ce que le changement de propriété a eu comme effets sur la gestion "day-to-day" de ces entreprises?

Contrairement à ce que l'on peut souvent entendre,qui laisserait croire que le propriété financière de sociétés grand public favorise les restructurations drastiques et la perte d'emploi et met l'accent sur des choix de rentabilité à court terme, les managers d'Orangina-Schweppes et de Mont Blanc Materne se montrent enthousiastes de la tournure prise par leurs sociétés depuis le rachat.
En effet, Orangina-Schweppes et Mont Blanc, qui vivotaient en marge respectivement des groupes Cadbury-Schweppes et Nestlé, avec des marques gardées au seul but de générer du cash mais sur lesquelles il n'y avait plus aucun investissement de croissance, ont bénéficié depuis leur rachat d'une nouvelle jeunesse.

Dans le cas d'Orangina, 1.9 milliards € ont été investis pour ré-amorcer une dynamique de croissance. Les budgets publicitaires ont été augmentés de 10% en 2006 (pour 19 mio d'€ investis) et 10% en 2007. Le management a fait l'objet d'un renouvellement très important (70% sur 1 an). L'activité a été restructurée pour se concentrer sur les deux marchés prioritaires: la France et l'Espagne. Pour d'autres filiales (l'Allemagne par exemple) une logique de franchising a été privilégiée. Deux usines ont été fermées (à Madrid et en Bourgogne). L'organisation a été quasi-totalement décentralisée (sauf pour certaines fonctions comme les achats, la R&D, la finance), avec une responsabilisation totale des filiales et sans modèle de gestion centralisé. Cela permet plus d'agilité et une plus grande focalisation sur le marché final. Résultats de toutes ces opérations? Une croissance de 6% à partir du 2è semestre 2006 qui devrait passer à 7% pour la totalité de l'année 2007.



Mont Blanc
a suivi à peu près le même parcours, sauf qu'à contrario d'Orangina et selon les mots de Michel Larroche -son président- Mont Blanc était au moment du rachat "petit, moche et triste". Il s'agissait d'un tout petit business et il fallait lui insuffler de la dynamique pour en réduire les risques. Une première phase a consisté à mettre en autonomie l'entreprise pour passer des systèmes d'information propres à Nestlé (SAP) à de nouveaux logiciels. La nouvelle équipe dirigeante a été cooptée en 3 mois par réseau et une force de vente a été mise en place. Les actions de restructuration se sont ensuite concentrées sur la gamme: amélioration du mix produits, modification des packagings, amélioration des recettes, reprise de l'effort publicitaire. En remettant"du kérosène dans le moteur" Michel Larroche et son équipe ont réussi sur 2006 à faire passer la rentabilité de 4% à 10%, tout en augmentant les investissements marketing.



Quelle analyse font les sociétés soumises à des LBO de leur expérience?

A priori les sociétés rachetées en LBO s'accroissent plus vite que les autres. La nécessité de rembourser la dette et de créer rapidement de la valeur pour les actionnaires impose des décisions rapides et efficaces. La notion de temps devient essentielle, car on n'a que quelques années pour réussir.

Pour les managers cela signifie plus d'autonomie mais aussi plus de responsabilités. En effet les organisations sont simplifiées par la restructuration. Qui dit moins de couches hiérarchiques, dit moins de possibilités de diluer sa responsabilité en cas d'erreur!

Les fonds d'investissement sont très professionnels dans l'ingénierie financière et laissent les managers gérer le business.

Les rapports avec les fonds sont caractérisés par une totale confiance et transparence. Les actions étant à mener dans des timings très serrés il n'y a pas la place pour le "maquillage" des chiffres ou pour se créer des "matelas" pare-coups. Un manque de performance des managers ne peut être dissimulé. La conséquence de cela est que seul des managers à l'esprit entrepreneurial particulièrement développé évoluent avec enthousiasme dans ces structures, où ils retrouvent la liberté de mouvements, l'efficacité et la rapidité d'action qui caractérisent leur style de management.

Dans les LBO le top management est beaucoup plus disponible pour le business et donc pour la création de valeur et ne passe plus son temps à justifier son action, ou à faire du reporting à sa hiérarchie, comme il est souvent le cas dans les grands groupes.

La notion de cash devient très pressante et très réelle, car il faut rembourser la dette: on ne peut pas manquer de "working capital".

Pour réussir il faut simplifier les process et définir peu d'objectifs stratégiques clairs portant sur les marques, le positionnement sur le marché, l'innovation produit et les investissement publicitaires.

Il faut savoir décider vite! Que cela concerne le développement du business par croissance externe (rachat de sociétés) ou la gestion day-to-day, le temps est compté. En savent quelque chose Orangina, qui a racheté la société Rosinka en Ukraine en 5 semaines, ou Mont Blanc, qui a décidé du rachat de Materne en 1 jour!

En LBO, il faut savoir trouver le bon point d'équilibre entre le rythme des changements que la société est capable de digérer et la volonté de changement propre aux investisseurs. Quand cet équilibre est inexistant beaucoup de managers quittent et le top management est quasi-totalement remplacé.

Sur le long terme les LBO sont générateurs d'emploi car ils créent une dynamique de croissance.

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